vendredi 27 mars 2009

I was just guessing at numbers and figures / Pulling the puzzles apart / Questions of science, science and progress /Do not speak as loud as my heart

Des fois on ne sait pas très bien. C'est comme si subitement on était devenu autre, mais en gardant le souvenir de ce que l'on a été. Pendant des années, on essaiera de se retrouver, en vain. Pendant toute une vie.

Les jours prennent une teinte voilée de blanc comme un matin d'hiver, la joie et la douleur passent en effleurant à peine le visage. Il ne reste rien. Le bruit m'insupporte à même titre que le silence, et les point d'interrogations remplissent le carnet. L'écharpe remontée un peu, la mèche s'échappe du chignon et je croyais que j'allais sourire au soleil. Dans le creux de la main, je voulais sentir les battement de son cœur, mais le petit oiseau n'était plus. Il était tiède de sa vie encore lorsque la terre l'a repris. Au dessus de lui, le forsitsia s'apprête à fleurir.

Les matins sont lourds comme un arrêt de mort, mais lorsque les rideaux s'ouvrent pour laisser entrer le jardin, la lumière est déjà trop crue pour les yeux fatigués de dormir. Avant la première note, les mains restent suspendues au-dessus du clavier. Le temps s'arrête, j'imagnen le son qui va naître, la sensation des touches lisses et fraîches comme des lèvres, et un frisson me parcourt l'échine.

Dans le carnet pour Paris, les pages noircissent, et je me souviens de Rimbaud que je lisais dans le métro, des livres dont on caresse la couverture ternie et des amoureux sur le pont des arts. Les bagages, une fois de plus, et je croise les doigts pour.


samedi 21 mars 2009

Finale - Bewegt, doch nicht zu schnell

Il y aura Musset au soleil, avec un verre d'eau et les chiens qui aboient, la promenade trop longue pour voir les forsistia couverts de gros bourgeons jaunes prêts à éclater, et le déjeuner avalé en vitesse pour. , les exercices de technique font travailler la tête plus que les doigts, les tulipes sur le bureau et les accents d'Italie du jardinier en veston élimé.

Bruckner se confond avec mes rêveries de fin d'après-midi, étudier dans sa ville. Les projets sont comme un château de cartes, il faut faire attention à ne pas monter trop haut. La pile de lettres portée à la poste, Paris se dessine avec plus de netteté, et il faut laisser la plume s'ébattre sur le papier ligné. Il y a encore tant à lire, tant à jouer, tant à apprendre qu'il me faudrait une jeunesse de cent ans.

C'est en jouant un choral que j'ai réalisé que c'était le printemps. Officiellement. Et les jonquilles se préparent pour Pâques.

mardi 17 mars 2009

Il fait si beau sur la ville, si beau sur les toits / Envie d'ouvrir la grille aux témoins de Jéhovah

La veste se portait sur le bras et nous avions décidé de monter à pied à la gare. L'air était parfumé du babil des oiseaux, et en quittant nos sièges, nous avions peine à réaliser que. Paris dans deux semaines, j'ai l'impression de rentrer à la maison bientôt, après un long voyage. Dans le carnet de Moleskine, les concerts se heurtent avec les galeries, et je repense au chaises vertes du Luxembourg. La ville sent le printemps, avec un bouquet de tulipes jaunes sous le bras, et G. répondait peut-être.

Le cadeau de A. dans une enveloppe couleur feuille de tulipe, et je souris de la coïncidence. Les lettres à l'encre noire sur la carte, et les petites étoiles dorées qui tombent dans un doux tintement en déchirant le papier. La montée que j'ai gravi trois fois dans l'après-midi, les colles de géographie avec l'employé au guichet de la poste, et je croise les doigts pour Verbier.

Dans la salle, le professeur a lu un poème et appelait les souvenirs du semestre passé, et devant l'institut, la Professeur passait en lançant un gai bonjour! et en se demandant ce que je faisais là, tandis qu'une petite fille sautait à pieds joints dans la plate-bande prête à être replantée et se tournait étonnée vers sa maman, pourquoi le monsieur il a tourné la terre? Les cageots de pensées encombrent la cour et embaument l'air transparent.
La veste se portait sur le bras, et l'université sentait la fraicheur des fleurs colorées.

mercredi 11 mars 2009

I can still recall our last summer / I can see it all

Les images de champs embrassés par milles fleurs riantes semblent appartenir à un passé fictif, et je me demande si l'été va réellement revenir, avec ses longues soirées tièdes et ses feuillages vert profond. Le soleil qui visite ma chambre me rassure en caressant doucement mes cheveux. Alors il faut jouer Bach, et tout redeviendra paisible et évident.

Hier je m'inscrivais à la fac de Zurich, et soudain je ne savais plus. V. s'interrogeait de monter un programme et le présenter, mais je ne me sentais pas la force de repasser tout cela. Lorsqu'un oiseau veut s'envoler, il faut lui laisser sa liberté.

Les jours sont bercés par cette lettre qui n'aurait jamais dû être écrite et les gros volumes de bibliothèque poussiéreux. L'échange avec Ca. pour vivre ce rêve, les projets avec N. et le piano travaillé méthodiquement. Les larmes dissimulées par des blagues, mais ne pas savoir cette langue me fait mal. Alors je caresse délicatement les fleurs qui gambadent dans le jardin comme des poussins. Il y en aura d'autres.

Promets-moi que tu reviendras.

samedi 7 mars 2009

Пела, пела пташечка / И затихла; / Знало сердце радости / И забыло.

Le soleil dans mon café, les mots tourbillonnaient trop vite, trop vite, les doigts se crispaient sur le petit livre, et la vie retrouvait un jardin oublié. Les phrases de Nina Berberova qui sèment la vérité. Le soleil dans mon café, les mots qui tourbillonnaient trop vite, et je croyais que ma vie était belle.
Dans cet hiver qui ne veut plus partir, il y aura eu ce prélude que l'on joue au petit matin, en attendant de beurrer les tartines de pain grillé, la salle de bain toute propre, et ce quatrième livre lu d'une traite.
Et l'étranglement de réaliser.

Le banc donne sur le lac et le soleil, les pages tournent, un monde qui s'ouvre et danse avec moi, il y avait les vitres que l'on lave en chantant, et les bourgeons qui grossissent. Et la petite mésange bleue qui me regardait faire et me parlait du printemps.

Hier soir, A. me disait qu'elle était guérie, et P. me proposait de l'aide. Il y a cette liste qui s'allonge, les rêves dansaient entre les lignes, et je pensais que parfois c'était difficile de les saisir, et qu'ils mouraient lorsqu'on y parvenait. Dans la solitude de la nuit, j'ai glissé ma main entre ma joue et l'oreiller trop mince, j'ai regardé le livre, et je lui ai promis que.

Il chantait, il chantait, le petit oiseau.

mercredi 4 mars 2009

Et tout au fond de notre coeur / Ces mots sont écrits à la craie

Il est grand, bien proportionné quoique un peu sec. Un ample pantalon de velours côtelé couleur de café flotte autour de ses jambes et a depuis longtemps perdu sa forme aux genoux.
Il pénètre dans la petite salle de séminaire surpeuplée d'étudiants rêveurs, une démarche souple et élégante de danseur, avançant un peu par à coups, comme s'il devait à chaque pas se rappeler qu'il doit avancer.
Sa bouche prononce les mots avec un plaisir presque charnel du son que l'on goûte, dont on imagine la couleur, dont on savoure par avance la saveur. Un mot toujours juste, qu'il cherche en aspirant l'air dans un léger sifflement.
Il annonce un changement de salle, des sourires agréablement surpris lui répondent.
Il parle comme un livre.
Son regard erre de visage en visage pendant ses explications, s'attardant sur l'un ou l'autre. Un sourire, comme une excuse se dessine sur son visage à la peau fine et légèrement colorée, vous comprenez la question.
De grandes mains d'intellectuel, fines et osseuses, supportent le poids de son buste qu'il tient penché par-dessus le bureau.
Il parle, et il semble oublier qu'il parle, oublier qu'il a une cinquantaine d'étudiants tout ouïe. Ses yeux vagabondent avec son esprit, parmi les vers et les mots des tout grands de la littérature.
Il n'a pas conscience de ce qui se passe dans la salle. Il est bien loin de ce qui se passe ici bas. Parfois il semble réaliser notre présence et furtivement, l'expression d'un sourire confus traverse ses traits bien découpés.
Il est touchant, dans une sorte de naïveté, de gaucherie aussi.

lundi 2 mars 2009

Le vent de l'Est souffle dans ma boîte à lait

Un long silence plus tard, les arbres ont revêtu leur voile de mariée et l'air embaume un parfum fait d'essence suave de fleurs et d'exhalation épicée d'herbe coupée.
La lettre aux milles timbres - dans l'un, une ballerine danse le finale de casse-noisette, que le pianiste, dans l'autre, accompagne sur un grand piano à queue, tandis que dehors gargouille l'eau claire d'une belle fontaine, et plus loin, hors de la ville, une cigogne cherche son déjeuner.
La lettre aux milles timbres et aux caractères exotiques et mystérieux qui font rêver.
Astrakhan - Астрахань
Une foule bariolée, des cafetans, des turbans, des barbes noires en pointe, des vieillards qui fument la pipe sur le pas de la porte, des petites vieilles aux fichus colorés qui font sécher les feuilles de tabac. Des routes poussiéreuses, des moutons, des poules et des gamins mal torchés. La silhouette orientale d'une église orthodoxe, un russe chantant et épicé.
Александр, sans le savoir, a glissé un bout des confins de la Sainte Russie dans son enveloppe blanche aux milles timbres qui font rêver.
Il m'écrit Е. Кисин, d'une manière naturelle, parce c'est comme ça qu'il a toujours écrit, parce que cet alphabet est le sien depuis toujours. Ces lettres qui contiennent à elles seules tout le caractère mystique de la langue, de la culture et de l'âme russe.

dimanche 1 mars 2009

La feuille d'automne emportée par le vent / En ronde monotone tombe en tourbillonnant

Le vieil immeuble gris toussait dans l'air glacial qui sifflait en courant à travers ses fêlures de vieillard tuberculeux. Le vent gambadait gaiement, avec cette brusquerie des jeunes gens roses de santé qui ne sont pas encore conscients de leur force, et parcourait les pièces, virevoltant comme un jeune étalon. Plein de fougue, il frôlait les murs couverts de lèpre, craquelés, souffrants et geignant, se cognait contre une porte fermée qu'il secouait alors vivement, dans un grand éclat de rire. Il jouait aussi avec l'écho, cherchant à faire répéter la plus belle des mélodies. Il se plaisait à siffler un air de danse dans l'entrée. Les délicates feuilles mortes venues se réchauffer quittaient alors leur siège et venaient, dans leur élégante toilette dorée, former une ronde. Le vent tournoyait parmi ces belles, esquissant quelque menuet aérien, en attendant le retour des beaux jours.
Ainsi passa l'hiver gris et sévère. Il passait à travers la ville, dans son grand manteau de laine, appuyant son pas lourd sur une canne lugubre qui résonnait d'un bruit sec et décidé sur le pavé enneigé des ruelles frileuses. D'épais sourcils cachaient à demi son regard dur qui restait figé comme un bloc de glace droit devant lui. Il avançait sans regarder ni à droite, ni à gauche, sans prendre le temps de s'asseoir un instant au bord du chemin pour souffler un peu, sans s'accorder le moindre verre de liqueur dans une chaude taverne. Vagabond austère et solitaire contraint d'errer éternellement sur les terres gelées, il a parcouru la ville, courbé sur son bâton noueux.
Derrière cette ombre triste et silencieuse, galopant d'un rire effronté, le jeune printemps efface les traces de pas que le marcheur a laissé dans la neige molle. Bruyant d'une gaieté insouciante, il frappe aux fenêtre avec son sourire rayonnant de joie de vivre. Ses joyeuses promenades le mènent sous les fenêtres mortes d'une bâtisse fade comme le brouillard d'automne. Ne voyant personne, le prince vert se faufile furtivement à l'intérieur et glisse contre les murs malades à la recherche d'une bonne âme à qui faire la risette. Enfin il découvre une pauvre petite racine qui pleure doucement, si mal en point! brune, toute desséchée et grelottant de froid. Pour la consoler, le printemps lui conte de longues histoires qui parlent de lointains pays dans lesquels l'été dure toujours. La petite racine sourit déjà à travers ses larmes. Pour la réchauffer, le jeune chevalier déplace le soleil pour qu'il couvre la demoiselle de son voile orangé et s'envole par la fenêtre dans l'air parfumé de lilas.
Le vent, croyant avoir entendu un bruit, laisse là ses belles amies et leurs volants de mousseline, et part s'informer, ravi de cet évènement inattendu qui vient pimenter son quotidien. Il grimpe les escaliers grognons, ouvre les portes, s'élance avec fracas dans les pièces et se heurte inlassablement au vide cynique qui rit de lui dans sa méchante barbe jaune et filasse. D'où vient donc la rumeur qu'il avait entendue? A-t-il rêvé? Le vent se désespère. Las et fatigué de ses déceptions, il passe le seuil d'une misérable chambre de bonne, oubliée depuis de nombreuses générations. Il lui semble que quelque chose n'est pas à sa place... Là! les rayons du soleil ont bougé! Ils dessinent leur rectangle de miel lumineux dans un coin reculé de la pièce. Au milieu de ce nectar tiède, une petite créature chétive tremble timidement devant lui, avec un regard interrogateur. Intrigué par cette nouvelle pensionnaire, le vent s'approche de cette frêle jeune fille à l'habit d'un joli vert tendre et fragile.
C'était une jeune pousse de rhubarbe assise entre les pierres du vieux mur fatigué.