samedi 26 février 2011

comme une fin d'été

Quand tu as dit ça comme ça brusquement, avec le sourire, il y a eu un court-circuit. Avant de partir, j'avais noté que je voulais t'embrasser à mon retour, comme ça, sans crier gare, juste parce que j'en aurais envie. A Paris, je pensais à ce baiser, j'imaginais le goût, la saveur, le parfum, je sentais tes lèvres déjà et la chaleur lorsque tu m'embrasses avec insistance, à Paris, j'imaginais ta surprise et dessinais ta joie du bout des doigts dans l'air tiède de ces beaux jours. A Paris, j'avais hâte d'être de retour, de frapper à ta porte avec le coeur qui bat très fort.
Je l'ai revu longtemps après mon retour, il avais mis son pull bleu que je déteste et la lumière de la salle de concert était crue. J'avais mal au dos et la musique était trop forte, et je savais qu'il n'y aurait pas son appartement, ni le mien. Il s'est assis face à moi dans le métro, et il m'a confié qu'il quittait définitivement la ville et le pays en novembre. Avec le sourire. Je n'avais plus envie de sa présence, j'avais envie de la nuit, de crier sur le pont qui enjambe le canal, crier des menaces, la douleur, la destruction, si tu pars je me tue. Peut-être que novembre sera la liberté retrouvée, la porte enfin ouverte, la fin. Mais en attendant, il y a les nuits trop longues, les yeux ouverts sur le plafond noir et les larmes dans la gorge, il y a les jours qui restent et l'angoisse du vide à l'opéra; il y a l'intuition de la déchirure à venir.

samedi 5 février 2011

confessions des soirs d'hiver

Seule dans ton minuscule deux pièces, en tailleur devant le canapé-lit, j'éparpillais les partitions rédigeant mon essai sur Scriabine, tu étais parti je ne sais trop où et tu m'avais laissé les clés. Il faisait froid, j'avais envie de thé, d'un earl grey avec un peu de lait et d'une compote de fruits rouges que tu n'avais pas. En rentrant du supermarché il y avait la lumière chez toi, je t'ai rapporté du gingembre confit et des gâteaux aux amandes. Tu m'as demandé si je m'installais définitivement chez toi, je n'ai pas répondu. J'aime quand tu parles comme ça, mais tu sais bien que je n'abandonnerai jamais mon appartement rêveur - j'ai des fenêtres, la rue bordée d'érables, la petite place et le grand parc, j'ai les vieilles portes à battants - j'ai la poésie, tu as le confort. Mais je t'aime, c'est vrai. Et puis j'aime quand tu me regardes travailler, quand je sens que tu me désires sans oser me déranger. J'aime manger dans ton assiette et te voler ton thé, que tu me serre contre ta poitrine et que tu es trop grand pour moi, j'aime ces baisers tout juste retenus et ton bras autour de mes épaules dans le métro.
Il ne faut pas qu'on se voit trop. Juste comme ça, parfois, des moments volés, quand on oublie de faire semblant de ne pas s'aimer.