Seule dans ton minuscule deux pièces, en tailleur devant le canapé-lit, j'éparpillais les partitions rédigeant mon essai sur Scriabine, tu étais parti je ne sais trop où et tu m'avais laissé les clés. Il faisait froid, j'avais envie de thé, d'un earl grey avec un peu de lait et d'une compote de fruits rouges que tu n'avais pas. En rentrant du supermarché il y avait la lumière chez toi, je t'ai rapporté du gingembre confit et des gâteaux aux amandes. Tu m'as demandé si je m'installais définitivement chez toi, je n'ai pas répondu. J'aime quand tu parles comme ça, mais tu sais bien que je n'abandonnerai jamais mon appartement rêveur - j'ai des fenêtres, la rue bordée d'érables, la petite place et le grand parc, j'ai les vieilles portes à battants - j'ai la poésie, tu as le confort. Mais je t'aime, c'est vrai. Et puis j'aime quand tu me regardes travailler, quand je sens que tu me désires sans oser me déranger. J'aime manger dans ton assiette et te voler ton thé, que tu me serre contre ta poitrine et que tu es trop grand pour moi, j'aime ces baisers tout juste retenus et ton bras autour de mes épaules dans le métro.
Il ne faut pas qu'on se voit trop. Juste comme ça, parfois, des moments volés, quand on oublie de faire semblant de ne pas s'aimer.
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