lundi 26 avril 2010

trou

c'est venu tout d'un coup, une immense fatigue, et les larmes pour tout, pour rien, les fraises dans le frigo, un paquet à la poste, il faudrait manger. Et le pique-nique dans la forêt, marcher dans les broussailles, perdre le chemin, l'orientation, à la recherche d'un coin d'herbe où étendre now couvertures, le vin de S. dans les gobelets en plastique, la quiche de T. avec du mouton, pour faire plaisir à Mohammed mais des lardons aussi ça ne dérange pas Mohammed, parce qu'ils sont cachés. Les résultats de l'élection, le magnifique parc trouvé, enfin, après avoir terminé le gâteau pomme-amandes.
Le soleil oblique sur la place, le petit lit en fer et la fièvre qui monte, le thé à la camomille, et réaliser que cette maladie résout finalement un paquet d'interrogations.
La tête crie moins fort, j'envisage des cafés demain. Et toute la semaine.
Il y a les rencontres, inattendues, éblouissantes. Ce violoniste que j'aurais aimé connaître mieux et avec qui on me propose de jouer, parler de Dostoevsky et de Kundera dans le métro, et comme Mélie, bon sang comme ça faisait longtemps.

mardi 20 avril 2010

tacet

et puis une feuille A3 jaune, hier matin à l'institut. Le professeur A. est décédé dans la nuit, ses cours n'auront plus lieu. Il était mon professeur préféré, il était notre professeur préféré. Tout vient en vrac, les rires, les larmes, c'est fatiguant. Alors je me retire dans ma bulle, je flotte au-dessus de la vie, le temps de récupérer un peu.

vendredi 16 avril 2010

la fenêtre grande ouverte

Je disais à A. la sérénité d'avoir claqué la porte, je n'ai pas encore sérieusement cherché quelque chose- j'ai seulement postulé pour trois places, les meilleures que j'aie pu trouver, et plus tard, il y a des téléphones et des mails, et des entretiens notés en rouge dans l'agenda. L'appel du festival ce matin, le visage encore couvert de savon, la surprise d'entendre parler français. C'est un commencement, tout est encore à inventer, alors je prends ma plume et je trace des lignes, des mots, des courbes, et lorsque je me sens déborder, je m'installe au piano, une heure, deux heures, le temps qu'il faudra pour sentir à nouveau la terre ferme sous mes pieds.

Les visages défilent, I. hier dans le petit 2 pièces, les tasses de thé depuis longtemps utilisées séparément, les bêtises dans la cuisine avec les emballages d'after eight, les peluches sur le tapis de la grande chambre, entre les fous rires et les confidences, la compote de rhubarbe, l'anglais teinté d'afrikaans, l'accent russe et les messages en vers sur l'ardoise de la cuisine.

Un mail à Dodoré commencé à 15 heures et terminé à minuit, les bourgeons devant la fenêtre et les fleurs de tilleul dans les cheveux, le parapluie rouge à pois est cassé, mais cela ne fait rien, le soleil est revenu.

mercredi 14 avril 2010

là-bas, très haut dans le ciel

tu as sauté. Oui, j'ai sauté. c'était dur, d'oser, je veux dire. Savoir que c'est juste, mais rester accroché à la falaise, regarder les ailes, savoir qu'elles peuvent porter, mais la méfiance, et si elles trahissaient. Alors il m'a poussé, une gifle, violente. Sa main dans mon visage, et tout qui devient noir. Je retiens mon souffle- je saute. J'ai sauté.

Au détour d'une rue, les escaliers descendent vers le canal, il pleut, ou plutôt non, il a plu. Toute la journée. Et puis l'herbe semble s'étirer comme après un long sommeil, et c'est vrai, tu as raison, les merles chantent plus fort après la pluie. Regarde la pointe du Stephansdom là-bas, dans l'horizon jaune comme une pêche mûre, on dirait une aquarelle de Caspar David Friedrich. Il y a des buissons emmitouflés de petites fleurs blanches comme un voile de mariée, le parfum frais et épicé de la pluie sur les arbres et la terre. Au détour d'une rue, ce sont les goûts musicaux qui s'élargissent, et la surprise de le réaliser.

Le matin, ce sont les tranches de pain que l'on compte, à midi le bol de riz est un peu moins plein, et le soir une pomme glissée dans la sacoche avant de sortir. Mais la dignité retrouvée, mais le courage de ne pas entrer dans le système, mais la liberté d'ouvrir de nouvelles portes.

J'ai sauté, et regarde!

je vole!

vendredi 9 avril 2010

tout le sang de mes larmes

J'écrivais quand je ne pouvais plus parler. Aujourd'hui il faut à nouveau se taire. Il n'y a plus de bouteille à la mer, plus personne à appeler. Quand je rentre souvent sous les draps je cherche une peau pour réchauffer la mienne. Une main pour soutenir mon cœur. J'enlève, j'enlève les épaisseurs jusqu'à ne trouver que mes doigts pour enserrer mes bras, ma taille, tout, tout le reste. Je me sens petite chose noyée dans un corps océan immense, malade. Les vagues ne me ramènent pas de message. Non. C'est fini. On a pris le large.

Elle a parlé pour moi.